Le tout petit temps.

Bien sûr, tu peux regarder dehors, porter des drôles de boucles d'oreilles, lire des nouveaux livres, sortir dans la rue. Tu peux boire du porto dans un tout petit verre, la nuit par la fenêtre. Tu peux téléphoner ailleurs, parler beaucoup, essayer de tenir comme il faut une contrebasse, accrocher des cartes de Titouan Lamazou, et même dessiner des monstres avec des yeux de grenouilles. Tu peux trier tes cartons, penser à rappeler la banque, aller te perdre dans la forêt, envoyer des courriers recommandés, faire une prise de sang, écrire des listes dans ta tête. Tu peux prendre des dispositions, essayer des nouvelles lunettes, couper tes cheveux, prendre des rendez-vous, faire des projets, des plannings et remplir tes journées à grand ras-bord, l'air de rien, et même, souvent, prendre à peine du temps futile, rire franchement. Tu peux être très fatiguée, t'endormir très facilement.

Mais il y aura toujours un tout petit temps creux pour écouter la Voix Sournoise, un tout petit temps pour la peur insidieuse.